« Il y a un moment pour tout… »

…et un temps pour chaque chose sous le ciel, on le sait grâce à l’Ecclésiaste, et le constat vaut pour nos habitations. Un temps pour peupler, un temps pour vider. Un temps pour bâtir, un temps pour partir. Et la durée d’occupation n’a évidemment rien à voir avec la viabilité de la charpente ou des matériaux. Une maison peut vivre des siècles, le projet qui lui a donné sens une petite année. Qui n’a connu de ces couples fébrilement unis le temps de la construction – sélection du maître d’ouvrage, suivi des travaux, choix des matériaux- qui se sont séparés juste après l’installation ? Qui n’a ressenti la différence de vibration entre la maison de famille emplie d’enfants et le lieux déserté après le départ du petit dernier ?

Il en va des maisons comme des civilisations. Il a fallu cinq siècles à la civilisation Maya pour s’étendre dans quatre pays sur un territoire grand comme la France. Trois siècles ont suffi à la faire disparaître, mystérieuse évanescence implacablement finalisée, certes, par Cortes et ses amis conquistadors.

Il n’existe aucune corrélation entre le temps de mise en place d’un lieu et sa durée de vie effective. Il ne vit que par l’intention, le projet et la nourriture quotidienne apportée à ce projet. Réinitialisation permanente. Car le lieu a avant tout besoin de servir. Qu’il s’agisse d’apaiser le rescapé d’un divorce, de rétablir un adolescent en perdition, d’adoucir les derniers jours d’une personne âgée, de souder une famille recomposée… Le lieu tient à sa mission. Lorsque la mission ou le projet s’arrêtent, il cesse de vivre. Il nous quitte en quelque sorte, ce qui veut dire que nous l’occupons, mais nous ne l’habitons plus vraiment. Squat mécanique où les échanges sont réduits à minima. On y mange, on y dort, on y passe sans être affecté, aveugle et globalement indifférent. Et l’indifférence est le contraire de l’amour.

Et vous, où en êtes-vous avec votre maison ou votre appartement ? S’agit-il d’un lieu de vie, d’un espace de non-vie, ou encore d’un enclos de mort, une zone aux énergies atones qui ne donne rien parce qu’on ne lui apporte rien ? Attention, le jeu n’est pas à somme nulle. Cette pseudo-neutralité détruit de part et d’autre. On perd autant son temps dans le lieu, que le lieu le perd avec nous. Ce gâchis se paye lourdement. Pour l’éviter, retrouvons de toute urgence le projet qui donnera sens et vibration. Sinon quittons-nous, tristes certes, mais bons amis. Le lieu, tout comme nous, a mieux à faire et surtout, à vivre!

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